La logique du scorpion
par Israel Shamir
18 janvier 2008
http://www.israelshamir.net/English/Eng27.htm
traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier
L’étonnante bourrasque arctique qui gelait la
Palestine depuis quelques semaines est apparemment repartie avec
le Président Bush, nous abandonnant à notre perplexité quant aux
raisons pour lesquelles cet homme étrange est venu jusqu’ici ?
Certains optimistes incorrigibles ont fait état de leur
conviction que si Bush a convoqué la conférence d’Annapolis, et
s’il a entrepris sa tournée actuelle, c’était afin de réaliser
la paix au Moyen-Orient et d’améliorer l’image qu’il allait
laisser à la postérité !
« Il ne veut pas partir à la retraite avec
l’opprobre d’Abu Ghraib et de la guerre en Irak ; ce à quoi il
rêve, c’est qu’on se souvienne de lui, en bien »,
expliquent-ils. Les mêmes optimistes disaient la même chose à
propos du général Sharon à l’époque de son retrait dûment
médiatisé de Gaza. Il a fallu à peine deux ans pour que les
optimistes les plus invétérés comprennent que ce retrait (comme
nous l’avons écrit [wrote],
au moment où il se produisait) est précisément ce qui a permis
aux juifs d’infliger un surcroît de souffrances aux Palestiniens
et, ce, pour moins cher. Désormais, ils peuvent bombarder Gaza
comme bon leur semble, sans avoir à se tracasser des juifs
égarés qui risqueraient d’être touchés accidentellement.
Désormais, ils peuvent affamer Gaza et faire des milliards de
bénéfices en vendant leurs marchandises aux assiégés, quand bien
même c’est la communauté internationale qui paie la note [paid
by international community]. Telle était la nature de
Sharon : s’il vous donnait un morceau de pain, vous deviez
vérifier qu’il n’y avait pas une aiguille, au milieu ; s’il vous
donnait un verre d’eau, vous deviez redouter qu’elle ne fût
empoisonnée. Comme le scorpion du conte populaire moyen-oriental
[the
Middle Eastern tale], il n’aurait pu se comporter
différemment.
Bush est un jumeau américain de son ami légumier
Sharon, toujours plongé dans un état comateux et ne réagissant
plus qu’à la douleur. Ces types-là sont tout simplement
incapables de faire le bien. Si vous voyez Bush faire une bonne
action, dépêchez-vous de demander un rendez-vous à votre
ophtalmo ! Notre ami Jack Graham a écrit, récemment, que
l’Amérique n’est pas le Grand Satan. C’est vrai. Mais avec Bush,
elle pourra faire l’affaire, en attendant la venue de Satan en
personne…
Un psychanalyste pourrait tenter de désembobiner
le mystère de la profonde connexion entre Bush et les Néocons.
Quant à nous, nous n’allons pas étudier ses mobiles (est-il
zombifié ? est-il soumis à un chantage ? a-t-il été
ensorcelé ?) : nous les prendront, tout simplement, comme des
données de fait. Pour les Néocons, Israël/Palestine est le sujet
le plus important, la question centrale. Mais ils ne sauraient
se contenter de leur contrôle total sur la Palestine ; quel que
soit l’objectif de leur conspiration, elle requiert d’eux qu’ils
contrôlent totalement l’ensemble de l’Orient, de l’Inde à l’Ethiopie.
Ils reviendront faire un sort aux Palestiniens plus tard, quand
le reste aura été sécurisé. Actuellement, ils sèment le chaos,
et ils détachent les chiens de guerre, afin qu’ils puissent
divaguer en totale liberté.
Ils ont l’intention de détruire le Pakistan et
de se saisir de ses atouts nucléaires, ils veulent placer la
Russie et la Chine sous leur contrôle. Mais leur désir immédiat,
c’est de soumettre l’Iran. A cette fin, Bush a besoin de
comparses arabes à ses côtés. Les Maîtres du Discours clament
que les Arabes « tremblent de peur devant les soi-disant
« ambition nucléaires » de l’Iran, et ils pourraient même être
prêts à vendre le peuple palestinien, pour peu que les
Etats-Unis veulent bien « se charger » de l’Iran « à leur
place », dit John Whitbeck, qui qualifie à juste titre cette
affirmation de « psychédélique ». (En réalité, « la rue arabe
serait ravie, si l’un quelconque des pays musulmans à proximité
d’Israël (fusse un pays non-arabe et chiite) acquerrait des
armes nucléaires et établissait une « balance de la peur », en
lieu et place du terrorisme unilatéral que nous connaissons
depuis quarante ans », affirme-t-il.)
Il est possible de convaincre les Américains que
cette prétention psychédélique est recevable : les Maîtres du
Discours sont en mesure de convaincre la majorité des citoyens
américains d’absolument tout, même d’une invasion d’être
extraterrestres de couleur grise. Les Américains étaient
convaincus que les Vietcong allaient bientôt débarquer en
Californie, que Saddam Hussein avait des armes de destruction
massive et que les Irakiens embrasseraient les Marines US en
libérateurs. Aussi peut-on leur faire gober n’importe quoi,
toujours et encore, jusqu’au jour où ils décideront de secouer
le joug du lavage de cerveau que lui font subir les Maîtres.
Mais les Arabes ne marcheront pas, exactement comme les
Irakiens. Pour la prochaine manche, Bush doit assurer quelque
progrès, en Palestine. Il ne saurait, bien entendu, s’agir d’un
véritable progrès, car la Palestine, c’est le noyau, c’est le
but ultime ; cela serait déjà amplement suffisant, si cela avait
l’air d’un petit pas en avant.
C’est pourquoi Bush s’est livré à la farce
futile d’Annapolis. Si vous pensez qu’Annapolis et la visite de
Bush ont fait avancer ne serait-ce qu’un d’un pouce le
tristement célèbre « processus de paix », vous n’avez pas besoin
de l’Elektric Monk, cet appareil décrit par Douglas Adams comme
la machine capable de croire tout ce que les gens trouvent
difficile à gober – vous pouvez même battre cette machine à son
propre jeu ! Le patriarche catholique de Jérusalem, bientôt en
retraite, Mgr Michel Sabbah, a expliqué, à juste titre, durant
son homélie de Noël : « Un nouvel effort de paix a été entamé
ces dernières semaines. Pour que cet effort de paix aboutisse,
il faut une volonté ferme de faire la paix. Jusqu’ici, il n’y a
jamais eu de paix, tout simplement parce qu’il n’y a jamais eu
la volonté de la faire », et il a montré du doigt « le camp des
forts, celui qui a tous les atouts en main, celui qui est en
train d’imposer l’occupation militaire à l’autre ». De fait,
Israël ne veut pas d’une paix qui soit acceptable pour les
Palestiniens, mais (avec le Président Bush), il veut une paix à
sa convenance.
Les Arabes le comprennent aussi bien que
quiconque. Même le journal arabe consensuel le plus
pro-occidental, The Gulf News, d’Abu Dhabi, a publié [wrote]
une « Lettre ouverte à George W. Bush », disant : « Vous avez
dit que votre visite actuelle vise à réaliser cette paix si
longtemps négligée au Moyen-Orient. Une paix régionale ne
saurait être obtenue au moyen de l’escalade des tensions et des
menaces de changer les régimes politiques dans la région. Plus
important encore, cette paix ne sera pas rendue possible par
votre soutien à Israël, qui continue à défier le droit
international, à occuper des territoires arabes, à opprimer les
Palestiniens et à rejeter les initiatives de paix. »
Al Jazeeradit, quant à elle, faisant référence à des
« analystes », que « le président américain a trop tardé à
lancer ses appels à ses alliés arabes afin de s’opposer à
l’ « extrémisme » iranien, car des alliés clés des Américains
dans le monde arabe ont déjà placé tout leur poids dans un
rapprochement croissant avec l’Iran… Le maraudage américain au
Moyen-Orient a poussé les Arabes à adopter une attitude de
dialogue avec la République islamique ».
Le rejet, par la Russie, des sanctions contre
l’Iran, a joué un rôle fondamental en créant un changement de
climat, et on peut dire que Bush a raté sa chance de bâtir une
coalition anti-iranienne. Toutefois, la propagande
anti-iranienne occidentale a profondément influencé beaucoup
d’Arabes ;l même le site relativement progressistes de la
résistance irakienne,
www.uruknet.info, publie de terribles diatribes contre « les
Perses ».
Le Dr. Theodor Reik a écrit que les peuples et
les cultures marchent en permanence sur le même manche de
râteau : les Arabes se sont fait avoir, jadis, en soutenant
l’Angleterre, contre l’Empire ottoman. Le résultat a été
épouvantable. Mais cette expérience cuisante va-t-elle les
empêcher de réitérer leur erreur, ou soutiendront-ils les
Etats-Unis contre les Iraniens, si on leur offre un show
d’illusionniste suffisamment convainquant du président
palestinien Mahmud Abbas ?
On le voit : la Palestine reste la clé de tout…
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Scorpion Logic
By Israel Shamir
18.01.2008
http://www.israelshamir.net/English/Eng27.htm
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