Devinez qui n’est pas venu ?
par Israël Shamir
17.01.2008
traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier
Tandis
que le président Bush effectuait sa visite au Moyen-Orient, tous
les puissants et les gens d’en-haut venaient s’agglutiner autour
de lui : les princes venaient lui offrir des sabres d’une valeur
inestimable ; les présidents et les premiers ministres buvaient
le moindre mot lui sortant des lèvres et les évêques et les
imams honoraient ce chef d’Etat de leurs plus belles risettes.
C’est qu’eux, ils connaissaient la raison pour laquelle cet
homme (qui n’apprécie pas particulièrement les voyages
internationaux) avait fait le tour de la Planète en avion pour
venir les rencontrer. Tel-Aviv et New York avaient soif d’encore
plus de sang et de ruines. Seulement voilà : l’Irak était déjà
saigné à blanc… Donc, aujourd’hui, c’est l’Iran, qu’il convient
de bombarder, et Bush était venu mettre sur pied une coalition
des volontaires pour prendre part à la destruction de ce pays.
Histoire de gagner un peu de temps, Israël a perpétré une
hécatombe en son honneur – une cinquantaine de Palestiniens,
entre massacrés et estropiés -, et, jurant sur leur sang
répandu, Bush a confirmé le soutien illimité de l’Amérique à l’Etat
juif.
Parmi les victimes palestiniennes, il y avait
Hussam, le fils cadet de Mahmud Zahhar, ancien ministre des
Affaires étrangères de Palestine. Nous lui présentons nos
sincères condoléances : son fils aîné avait été assassiné par
les juifs, voici de cela quatre ans, au cours de leur tentative
d’avoir le père, et voici qu’aujourd’hui son fils cadet est mort
en héros, en défendant Gaza contre l’envahisseur. Mais la
disparité des forces est trop importante : quinze combattants
ont été tués, preuve que Gaza est toujours sans défense,
toujours désarmée, toujours à la merci d’un ennemi implacable.
Cette disparité risque d’induire les Israéliens à mettre à
exécution leur projet de reprendre le contrôle de la bande de
Gaza.
Tandis qu’on transportait les corps des tués
vers une mosquée, George Bush prêchait aux Arabes à quel point
Israël – ce phare de lumière et de démocratie au Moyen-Orient –
est un pays formidable, et il a enfoncé son message de guerre
contre l’Iran de plus en plus profond dans leur gorge. Il veut
vitrifier Téhéran et Chiraz avant la fin de son mandat. Cela a
été exigé de lui par ses hôtes israéliens, et, nous le savons,
George est toujours service-service, dès lors qu’il faut
satisfaire à leurs moindres exigences…
Les dirigeants arabes l’ont écouté, ils lui ont
offert des chevaux et ils ont fait crouler les tables rutilantes
sous la boustifaille. Oncques n’assistâmes-nous à reddition plus
infamante qu’icelle… Après avoir vu les dirigeants arabes en
compagnie de Bush, on n’a qu’une envie : s’excuser auprès du
Maréchal Pétain de l’avoir vilipendé comme nous l’avons fait.
« Du point de vue des populations locales, le
spectacle de leurs chefs héréditaires déroulant - littéralement
– le tapis rouge en l’honneur (et passant de lourdes chaînes
d’or symbolisant les plus grands honneurs de leurs pays
respectifs au cou) de l’homme quasi-unanimement considéré leur
pire ennemi de tous les temps par les Arabes, les musulmans et
l’Islam lui-même, de l’homme qui est d’ores et déjà responsable
de la mort de centaines de milliers d’Arabes et de musulmans, et
qui, manifestement, est impatient d’en massacrer encore
davantage, ce spectacle, disais-je, est peu susceptible
d’améliorer le respect dans lequel leurs peuples tiennent leurs
dirigeants », a écrit le perspicace John Whitbeck.
Mais
un dirigeant spirituel arabe a refusé cet honneur déshonorant.
Il a décliné l’invitation et les photos de famille. Il s’agit de
l’Archevêque Theodosius Atallah Hanna, le plus haut responsable
palestinien de l’ancestrale Eglise Grecque Orthodoxe de
Jérusalem et de Terre Sainte, cette communauté religieuse dont
le premier évêque fut un certain Jacques, le frère de Jésus.
L’Archevêque a refusé de venir à l’Eglise de la Nativité, à
Bethléem, où d’autres évêques ont, hélas, rencontré le vampire
couvert de sang. Cet acte noble et courageux a sauvé l’honneur
des Arabes. Parfois, un homme peut faire cela. Ainsi, un
lieutenant a sauvé l’honneur de l’armée tchèque, en 1938, alors
que, seul, et armé d’un simple pistolet standard, il a ouvert le
feu contre les tanks de l’armée allemande en train d’envahir son
pays. L’Archevêque Theodosius a suivi l’exemple donné par un
autre homme d’Eglise, son aîné, l’Archevêque Christodoulos, chef
de l’Eglise Grecque, qui avait, lui aussi, refusé de rencontré
le président américain durant sa visite en Grèce. Ces princes de
l’Eglise ont rejeté le fomenteur de guerres, comme nous a
enseigné à le faire le Prince de la Paix. Ce faisant, ils ont
aussi anéanti la billevesée d’un soi-disant « Conflit entre
Civilisations » ; ces chrétiens agissent pour la paix, et contre
la guerre. En cela, tous les gens sincères sont unis, qu’ils
soient musulmans ou chrétiens.
Les juifs, c’est autre chose
J’entends s’élever des protestations : « Et les
juifs, alors ? Tu les oublies ?!? ». J’aimerais bien les ajouter
à la liste, mais les chefs spirituels juifs ne sont pas
d’accord. Ils sont pour la guerre et le bain de sang, pour peu
que ce soit le sang des goyim qui soit versé. Le grand rabbin
ashkénaze Yona Metzger a remercié le président Bush d’avoir
envahi l’Irak, causant 200 000 morts. « Je tiens à vous
remercier pour le soutien que vous apportez à Israël, et en
particulier pour avoir fait la guerre à l’Irak », a dit Metzger
à Bush, écrit le Jerusalem Post [reported
Jerusalem Post]. Yona Metzger n’est pas du tout du genre
vieux juif ayant perdu contact avec le monde moderne. Je l’ai
rencontré, récemment : svelte, élégant, d’une grande prestance,
tiré à quatre épingles ; son chapeau haut-de forme aurait pu
faire pâlir d’envie quelque dandy londonien. Un prince, certes.
Mais un Prince de la Nuit et de la Guerre.
Metzger sait ce qui est bon pour les juifs, bien
que cela n’ait strictement rien à voir avec les aspirations des
juifs du peuple : le président ukrainien a dévoilé un monument
en l’honneur d’un dirigeant nazi ayant tué un nombre
incalculable de juifs ; il adore ouvertement la SS ukrainienne,
et pourtant, Metzger l’a béni, car il s’apprête à faire rentrer
l’Ukraine dans l’Otan. Le président biélorusse a dit que les
juifs sont incapables de balayer leurs rues ; Metzger l’a
attaqué, tel un Rottweiler, parce que ce Lukashenko ne privatise
pas les entreprises nationalisées. Metzger est un symbole de
l’intégration totale des juifs à l’impérialisme des Etats-Unis,
dont ils constituent la brigade spéciale, chargée de la
propagande. Il a été élevé, par la chaîne de télévision
américaine dirigée par des juifs, CBS, au rang des « douze
dirigeants religieux les plus influents dans le monde », aux
côtés du Dalai Lama et de l’Archevêque de Canterbury.
On dépense beaucoup de salive au sujet d’une
énorme différence qui opposerait les Ashkénazes, par nature
agressifs, et les Séfarades, par nature doux comme des agneaux,
mais la réalité coup court à ces élucubrations. Si un dirigeant
séfarade parle de l’Islam en bien, comme l’a fait le rabbin Haim
Ovadia, de Los Angeles, dans son article
The Bridge with Islam, largement diffusé par Internet
qui y vit une bonne nouvelle, vous pouvez être certain que cela
n’est qu’une tactique pour attaquer le christianisme. Pas
manqué : il se dit « juif de l’Islam », et il ne mentionne la
tolérance musulmane qu’à seule fin de mentionner, dans la même
phrase, « les croisades, le massacre de la Saint Barthélémy et
l’Inquisition » ; plus loin, il salit Saint François d’Assise et
l’Eglise, qui osent proclamer, encore aujourd’hui, que « notre
Seigneur, Jésus-Christ, est le seul vrai Dieu ». Il faudrait,
peut-être, que les chrétiens disent que Jésus-Christ n’est qu’un
dieu authentique parmi bien d’autres, pour faire plaisir au
grand rabbin ?
En réalité, les dirigeants spirituels séfarades
sont tout aussi assoiffés de guerre et de mort que leurs frères
ashkénazes. L’ancien chef séfarade, le rabbin Ovadia Yossef,
qualifiait les Arabes de « serpents » et d’ « Amalécites »,
qu’il convenait d’exterminer comme de la vermine. « Il est
interdit d’avoir une attitude miséricordieuse à leur égard. Vous
devez envoyer des missiles sur eux et les éliminer. Ils sont
mauvais, et damnables », a-t-il dit [said].
Tuez-les, tous ! Inutile de faire le tri entre les combattants
et les non-belligérants, a écrit [wrote]
l’ancien grand rabbin séfarade Mordechai Eliyahu. Il n’y a pas
d’interdit moral pesant contre le massacre aveugle de civils,
car tous les civils de Gaza sont collectivement coupables,
a-t-il dit, puisant son inspiration dans l’Ancien Testament. Son
phare dans la nuit fut le massacre de Shechem [Genèse 34] : deux
ancêtres emblématiques des juifs massacrèrent, en effet, tous
les habitants de cette ville (de nos jours : Naplouse), après
les avoir menés en bateau en leur demandant de se faire
circoncire. La conclusion du rabbin ? Le bombardement en tapis :
voilà le top du top !
Il a aussi exhorté Bush à faire les quatre
volontés des juifs, car la volonté des juifs, c’est la volonté
de Dieu : « Le peuple juif est éternel, et il se souvient à
jamais de ceux qui l’ont aidé, à travers l’Histoire, ainsi que
de ceux qui lui ont fait du mal. Je vous en supplie :
laissez-votre nom à la postérité en tant qu’un président qui
aura aidé le peuple juif, qui aura filé à un coup de main au bon
Dieu, au lieu de lui mettre des bâtons dans les roues », a écrit
[wrote]
ce rabbin. Et la volonté des juifs, c’est, pour l’éternité,
celle d’éliminer quelque goy dérangeant, ou un million de goyim
dérangeants, s’il le faut.
Quant à leur gratitude, parlez-en aux Brits !
Leurs dirigeants Balfour et Lloyd George ont cru à ce baragouin,
à ce pipo… Et ils ont versé le sang de leurs soldats, ils ont
conquis la Palestine, ils ont écrasé la résistance des
indigènes, ils ont permis aux Juifs d’y venir, ils ont formé
leur armée. Ayant fait tout ça, ils attendirent la gratitude
promise. Poilop : tout ce qu’ils obtinrent, c’est d’être
bombardés, lardés de coups de poignard, brûlés vifs, pendus et
humiliés de mille manières. Lisez, à propos de la « gratitude
des juifs » envers les Rosbifs, mon article
Prince Charming, je l’y évoque. Mais vous apprendrez tout
plein de choses à ce sujet dans un bouquin sioniste de chez
Sioniste : Exodus, de Léon Uris. Les faits rapportés sont
exactement les mêmes…
Certaines cultures tiennent en très haute
estime, de fait, le paiement des dettes. C’est le cas, par
exemple, des Japonais. Ils adorent payer leurs dettes. En 1905,
des banquiers juifs américains accordèrent aux généraux japonais
un prêt avantageux afin qu’ils réarment leur armée et qu’ils
filent la pâtée aux Russes. En retour, dans les années Trente,
les Japonais accordèrent un visa à tout juif en faisant la
demande. Mais les juifs n’ont pas de ces traditions
sentimentales. Ils disent : toi, tu empruntes du fric à
quelqu’un d’autre, mais tu le donnes, une fois qu’il
t’appartient ; tu l’empruntes à terme, mais tu le donnes
définitivement. Ou, encore plus simple : seuls les lâches paient
leurs dettes – y compris leurs dettes en gratitude. Quoi qu’il
en soit, « aider le peuple juif », pour reprendre l’expression
du rabbin Eliyahu, c’est le devoir sacré du goy, et là où il y a
devoir, il ne saurait être question d’une quelconque dette !
Si vous êtes encore dubitatif, allez poser la
question aux soldats de l’Armée du Liban Sud [South
Lebanese Army] : on les a laissé tomber comme une brique
chaude, dès lors que cela convenait à Israël. Allez interroger
les Polonais, qui ont permis à la plus nombreuse colonie juive
de tous les temps de s’installer et de prospérer à l’intérieur
de leurs frontières, à la seule fin de se voir affublés [branded]
à jamais de l’accusation infamante d’être des «antisémites
vicieux ». Mais nous nous en tiendrons là…
Dire « paix », c’est dangereux, car on peut
toujours être attaqué par des juifs toujours plus extrémistes.
Olmert n’a pas grand-chose d’un peacenik. Il a dévasté le Liban,
il affame Gaza et il y assassine des civils, quotidiennement.
S’il mentionne le mot « paix », c’est afin d’induire en erreur,
comme tant de politiciens israéliens l’ont fait avant lui.
Et pourtant, le rabbin Shalom Dov Wolpe, un
dirigeant du mouvement Khabad, l’a qualifié de « traître infâme,
qui mérite d’être pendu ». Yitzhak Rabin n’avait pas non plus
grand-chose du peacenik. Il a ordonné que l’on cassât les bras
et les jambes d’enfants palestiniens ; il a fait venir le Fatah
de Tunis afin d’écraser l’Intifada, sans que la Cour Suprême
d’Israël ne soulève la moindre protestation. Et pourtant, il a
été assassiné par un juif intégriste fanatique.
Hélas, cela est aussi peu convainquant que la
diffamation d’ « antisémite ». Certains juifs ont qualifié
Sharon, Rabin et Olmert d’ « antisémites ». De la même manière,
il y a des juifs qui considèrent le rabbin Kahane comme un
peacenik et un traître !
Mais, au-delà de cette réalité virtuelle, il n’y
a toujours pas d’Israéliens susceptibles d’accéder au pouvoir
qui fassent le moindre pas en direction d’une paix acceptable
pour les Palestiniens.
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